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Un grand merci au Docteur Joseph TACHER, à Jojo LE HYARIC et à sa fille Véronique, au Père Joseph MARQUER, au Père Marcel BILY, pour leurs contributions.
Giscard à Houat, 1977, Part 2 : Discours de V. Giscard d’Estaing, président
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Discours de Mr Valéry Giscard d’Estaing
Président de la République
Le 27 mai 1977
Monsieur le Maire,
Mesdames,
Messieurs,
La première chose tout d’abord que j’ai à vous dire ce sont mes excuses de ne pas avoir pu arriver chez vous comme il était prévu le 8 février dernier. Nous étions sur le continent, le temps était assez clair, mais dès qu’on s’est approché de la mer, il y avait une couche de brouillard qui collait absolument à la surface de l’eau et le trajet par hélicoptère était impossible. Nous avons hésité, nous avons regardé si il y avait d’autres moyens de venir. J’ai téléphoné au poste de surveillance des bateaux en mer et il était impossible de venir. Il a fallu donc attendre quelques mois. Mais lorsque je vous ai eu au téléphone, je vous ai dit que je viendrais quand même et je pense que vous vous en souvenez et j’imagine ce que vous vous êtes dit, cela fait partie de ces paroles auxquelles nous sommes habitués, paroles qui expriment la politesse des hommes politiques mais auxquelles il ne faut pas accorder sans doute une confiance excessive et en vous parlant j’étais au contraire décidé à venir. Aujourd’hui 27 mai, pour le 3ème Anniversaire de mon élection à la Présidence de la République.
Nous avons célébré le 1er Anniversaire en Alsace.
Le 2ème Anniversaire, l’année dernière, au Pays Basque et me voici pour le 3ème Anniversaire en Bretagne, dans votre île.
Vous venez de me dire à l’instant Monsieur Le Maire que votre île a des problèmes, bien que vous ayez souligné, ce qui est important, que depuis 25 ans, elle connaît une sorte de renaissance et sans doute il y a 25 ans, on jugeait avec pessimisme l’avenir de Houat et l’avenir des îles, et maintenant, au contraire, grâce aux efforts de ceux qui vous ont précédés, l’action de la population, grâce à l’attachement des fils et des filles de Houat à leur sol, on a le sentiment, au contraire, que la vie peut se développer et progresser sur votre île.
Naturellement vous avez un certain nombre de besoins et un certain nombre de problèmes que vous avez déjà exprimés dans cette brochure (…)
D’abord, je suis convaincu qu’une grande partie de l’avenir de la France est sur la MER et je vous le dit en tant que Président de la République, parce que la France, malheureusement pour elle, ne dispose pas de certaines ressources, nous avons, vous le savez, peu d’énergie, peu de pétrole, peu de matières premières, et par contre, nous avons la plus grande façade maritime d’Europe et cette façade maritime est importante puisque c’est au nord de la Bretagne que circule, à l’heure actuelle, le plus fort et le plus grand circuit du monde. Donc la façade maritime de la France est une chance pour l’avenir de la France et c’est une chance que nous devons saisir et développer.
Je ne dirai pas ce soir tout ce que nous devons faire à cet égard, mais je peux vous assurer que sous ma Présidence, la France aura une politique de la MER.
Dans cette politique de la MER il y aura naturellement le problème de la pêche et ce problème tout particulièrement attachant qui est le problème des artisans pêcheurs.
Vous l’avez évoqué, il se pose à l’heure actuelle, en termes internationaux, puisque nous sommes en train de changer le droit de la pêche en Europe. Mais il faut savoir que lorsque ce nouveau droit de la pêche sera en application, il sera favorable aux pêcheurs français, puisque les thèses que nous défendons : c’est-à-dire de considérer que la pêche doit être une ressource communautaire et non pas une ressource nationale, le fait que nous nous opposons aux bandes littorales dans les différents pays et notamment là où vont les Pêcheurs Bretons et que nous défendons avec obstination et à mon avis avec succès cette thèse, cela veut dire que les chances de la pêche française vont se développer en Europe.
Naturellement nous ferons attention à ce qu’un certain nombre de difficultés soit réglé dans les conditions dignes du droit communautaire et dignes des pêcheurs français et mardi prochain à Londres, ce problème doit être réglé.
Vous avez parlé de la protection de votre ressource et je crois en effet que c’est un aspect essentiel et que vous avez déjà observé une certaine raréfaction d’un nombre de produits de la mer. C’est pourquoi, vous le savez, le gouvernement appuie, approuve l’action que vous vous entreprenez ici, et d’ailleurs dans d’autres îles et régions de Bretagne pour le développement de la ressource et notamment pour la recherche et ensuite pour l’application de ce que vous faites en matière d’Écloserie.
Vous avez un problème financier puisque ceci naturellement vous coûte cher, je peux vous dire qu’au cours du mois de juin la somme que vous attendez en provenance de l’État sera versée de façon à ce que vous puissiez faire face à vos obligations à cet égard. Donc les cents mille francs, c’est-à-dire les 10 millions dans le langage familier, vous seront versées au cours du mois de juin.
À côté de ces problèmes de la MER et de la pêche, je voudrais vous dire un mot de ma Présidence de la République.
Lorsqu’on est élu Président de la République, le premier sentiment qu’on éprouve c’est un sentiment de solitude puisque par sa fonction, par ses charges, par la nature des problèmes qu’on a à traiter, on s’éloigne de la vie familière, de la vie quotidienne des Français et de la vôtre et la raison pour laquelle je tiens à célébrer cet Anniversaire parmi les Français et, comme vous l’avez dit, parmi des amis, c’est de façon à montrer que pour moi, l’essentiel dans ma fonction, ce n’est pas d’accentuer la différence, ce n’est pas de concevoir une Présidence de la République éloignée des réalités du Peuple Français, c’est au contraire d’être aussi près que possible de vos préoccupations et de vos convictions. J’ai eu depuis trois ans à exercer ma Présidence dans une période difficile et je te le dis parce que j’aurais souhaité que la période soit plus facile et que de cette façon je puisse accomplir plus. C’était une période pendant laquelle la France était divisée, nous traversons une crise économique. Sur la division de la France, je ne vous dirais qu’un mot, cette division est excessive et elle fait du mal à la France, je comprends naturellement que l’on ait des opinions politiques différentes, philosophiques différentes, mais il y a une certaine manière d’avoir ces différences, une manière qui respecte l’unité de la vie Nationale qui fait qu’on accepte de parler les uns avec les autres, de travailler les uns avec les autres et malheureusement la France, vous le savez depuis longtemps, est un pays qui exagère ses différences et qui en exagérant s’affaiblit et complique d’ailleurs la solution de ses problèmes. Je n’ai pas pu réduire la coupure de la France, mais vous avez certainement noté, puisque vous observez la vie publique et politique, que je n’ai rien fait pour l’accroître et que parfois si on m’a reproché de ne pas entrer plus activement dans les débats politiques, de ne pas polémiquer plus violemment avec les antagonistes, c’était une attitude choisie de ma part car lorsqu’on est responsable d’un pays, on doit avoir la conscience des problèmes de ce pays et on ne doit pas accentuer ses difficultés.
Si la France avait à sa tête un Président de la République qui accentue la division des Français au lieu de la réduire, c’est un pays qui irait vers des secousses et des aventures.
Je me souviens que quelques semaines avant mon élection, je lisais les déclarations des uns et des autres et on disait à ce moment-là : « Si Monsieur Giscard d’Estaing est élu, il se passera en France toutes sortes de drames ». Il ne s’est passé aucun drame. Nous pouvons célébrer, trois ans après mon élection à la Présidence de la République, sans qu’il y ait eu le moindre affrontement, la moindre bataille entre les Français. Comme je le disais ce matin au Ministres, il n’y a pas eu de Mai 75, de Mai 76, et il n’y a pas eu de Mai 77 et bien que la France soit divisée je lui ai évité les affrontements et l’aventure.
Pour ce qui est du progrès, il a été dans une certaine mesure, et il faut avoir la simplicité de le dire, il a été ralenti par la crise économique. J’aurais souhaité que ce progrès soit plus rapide, mais comme la ressource nationale était elle-même un peu réduite, nous avons pu faire un certain nombre de choses, il faudra en faire davantage. J’indique que sur ces sujets qui vous touchent, la situation des femmes seules, des handicapés, le minimum vieillesse des personnes âgées, la protection contre le chômage, on a pu, au cours des trois dernières années, appliquer en France une législation qui est une législation de progrès mais je souhaite que nous puissions aller plus loin et je souhaite que nous puissions répondre davantage à l’aspiration de justice, qui est l’aspiration de tous les français, notamment des plus jeunes d’entre nous.
Et c’est pourquoi, pour moi, quand je fais le point de cette année de Présidence, comme je le fais cette année, comme je le ferai l’année prochaine et les suivantes : ce n’est pas tellement l’occasion de réfléchir à ce qui a été fait, c’est l’occasion de me préoccuper de ce qui doit être fait pour que la France soit un pays exemplaire du point de vue de sa vie sociale, de sa vie politique et de l’entente entre les Français.
Vous avez employé tout à l’heure, Monsieur le Maire, (…) un mot très juste parlant des Houataises et des Houatais, c’est une communauté avez-vous dit. Et bien ce qui existe à l’échelon de votre île, après tout, pourrait exister à l’échelon de la France et puisque vous avez réussi à traiter le problème de votre île sur une base communautaire, malgré les différences d’âge, d’activité, dans une certaine mesure de conditions, je souhaite que cette attitude soit une attitude que l’on retrouve à l’échelon, à l’échelle de la France et qu’elle veuille bien se considérer comme une communauté.
Je vous remercie de nous avoir si bien accueilli Monsieur le Maire, Mesdames, Messieurs, les membres du Conseil Municipal, d’avoir fait de cet anniversaire pour moi une fête et je souhaite qu’ainsi encouragé, je puisse continuer à conduire le progrès de la France.